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La rue du Midi

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LE QUARTIER DE LA RUE DU MIDI

 

1.Un mot sur la rue du Midi.

 

Succédant à la première gare ferroviaire de l’Allée Verte (1835), les premières gare du Nord et du Midi furent respectivement construites place Rogier et place Rouppe. Bien vite, on s’aperçut de la nécessité de les réunir par une voie directe. C’est dans ce contexte que s’inscrit le tracé de la rue du Midi. Venant de la place Rogier, empruntons la rue Neuve, passons ensuite par la place de la Monnaie, pour arriver finalement à la rue des Fripiers, puis à la rue de Tabora (ancien tronçon de la rue au Beurre). Parvenu à cet endroit, il manquait une artère rectiligne pour permettre d’accéder directement à la place Rouppe, où se dressait jadis la première gare du Midi. C’est donc là qu’en 1841, on a décidé de tracer la rue du Midi, qui porta un temps le nom de « rue du Chemin de Fer ». La rue du Midi est constituée de trois tronçons d’âges différents :

 

a)Premier tronçon (90m) – Entre l’église Saint-Nicolas et la rue des Pierres : Cette artère est connue depuis le 12e siècle. Jusqu’au 17e siècle, elle porta le nom de Corte Steenstraete soit « Courte rue du Steen » (témoignage de la présence d’un « steen » ou « maison de pierre » à cet endroit) , dont on a ensuite fait la « Petite rue du Steen », pour devenir finalement la « Petite rue des Pierres ». Comme elle était située près d’un marché au lait, les Bruxellois la nommèrent tout naturellement « Melck straet », « rue au Lait ». Au 12e siècle, on trouvait dans cette rue un refuge-hôpital pour voyageurs nécessiteux, dédié à saint Nicolas. Ce fut peut-être là le premier hôpital de la ville. Il fut partiellement annexé par le grand couvent des Récollets qui fut bâti à proximité (place de la Bourse). Au 17e siècle, apparurent dans ses parages immédiats, une galerie des Merciers (dont le bruyant marchandage gênait, dit-on, les Récollets !) et une Pauvre Ecole pour enfants indigents. A noter que, reliant la rue au Lait à la Grand Place, une impasse nommée « Cul-de-Sac du gigot de Mouton », existait au 15e siècle et débouchait entre les maisons du Sac et de la Brouette. Cette impasse devait son nom à l’enseigne d’une auberge : Den Hamelen Baut (le gigot de mouton), qui faisait le coin de la rue au Lait. Elle fut obturée en 1697, lors des travaux de reconstruction (après le bombardement de 1695). Elle devint alors l’impasse du gigot, avant d’être supprimée en 1853 lors de la construction de la rue du Chemin de Fer.

 

b)Deuxième tronçon (200 m) – La rue du Chemin de Fer : C’est cette artère que l’on perça en 1841 et à laquelle on donna le nom de « rue du Chemin de Fer ». Tracée à travers l’ancien domaine conventuel des Bogards, ellle devait permettre de relier la rue des Bogards à la station de chemin de fer de la place Rouppe. En 1863, on lui donna le nom de « rue du Midi ». De fait, il était alors question de construire une nouvelle et grande gare du Midi dans les terrains marécageux du bas de Saint-Gilles.

 

c)Troisième tronçon – Le Mont de Piété (rue du Lombard) : Entre ces deux tronçons, un bâtiment massif faisait obstacle à leur raccordement : le vieux Mont de Piété de la rue du Lombard. Dès 1847, il avait été question de créer une artère unique reliant la rue au Lait à la rue du Chemin de Fer. On décida donc de raser le bâtiment gênant, de même que quelques maisons des rues du Lombard et des Bogards. Ainsi put être créée l’artère qui, après réunion des trois tronçons, allait porter, dès 1871, le nom de « rue du Midi ».

 

La rue du Midi est aujourd'hui une rue animée et commerçante, largement fréquentée par les…philatélistes professionnels !

 

2.Le tombeau supposé de saint Gratien.

 

Une légende prétend qu’un saint lyonnais du nom de Gratien serait enterré sous les maisons numéros 108 et 110 de la rue du Midi. Selon Louis Quiévreux, en 1937, Léopold De Ryck, alors propriétaire de ces immeubles, « reçut la visite d’un archéologue français qui lui montra d’anciens plans d’après lesquels la maison de la rue du Midi serait sur le site d’un cimetière désaffecté. Le visiteur voulait retrouver les restes d’un saint lyonnais inhumé, paraît-il, à cet endroit. Il désirait faire des fouilles dans la propriété de M. De Ryck, mais les événements internationaux l’en empêchèrent. » Le saint lyonnais serait donc toujours enterré à cet endroit… Reste à savoir…de qui on parle. Il y a certes bien un Gratien, un moine du 12e siècle, sous la tutelle duquel fut rédigé, entre 1140 et 1150, une œuvre collective rassemblant plus de 3800 textes concernant le droit canonique. Cette œuvre est connue sous le nom de « Décret de Gratien » ou Decretum Gratiani, qui formera la base du droit canonique de 1582 à 1917. Cela a-t-il pu laisser croire à d’aucuns que ce moine, dont on pense qu’il aurait été d’origine italienne mais dont, en définitive, on ne sait pratiquement rien, aurait été lui-même canonisé ? Peut-être, mais quel lien avec Lyon ? Un autre Gratien, empereur romain de son état, de 367 à 383, va collaborer ouvertement avec les chrétiens, au point de supprimer l’immunité dont jouissent les prêtres païens et les vestales. Il est aussi le premier empereur à refuser le tire de « pontifex maximus ». En 378, il fit retirer de la salle de réunion du Sénat, la statue de la Victoire, symbole païen. Ce Gratien a, effectivement le profil du candidat à la canonisation. En outre, il sera proclamé empereur à Amiens, ce qui nous rapproche de Bruxelles, et décédera à Lugdunum (Lyon), le 25 août 383, ce qui permet d’établir une relation avec notre histoire. Sans plus. Il y a évidemment un saint Gatien, premier évêque de Tours, mais rien, même son prénom, ne semble s’accorder avec la rue du Midi ! Tout cela ne sentirait-il pas un tantinet la « zwanze » bruxelloise ?

 

3.Le premier rempart à la rue du Midi.

 

« La première muraille d’enceinte de Bruxelles traversait jadis l’emplacement de la rue du Midi, à hauteur du n°110. Des pans de mur et des fondations y ont été démolis vers 1850 pour le percement de la rue. Mais le mur mitoyen des maisons 110-112 est constitué en partie des vestiges de la muraille antique (80 cm d’épaisseur). La cave du n°110 montre de gros moellons de grès empilés sans symétrie. Et au premier étage, le propriétaire a aménagé des placards dans certaines cavités de ce mur grossier. » (Dictionnaire historique et anecdotique des rues de Bruxelles, Jean d’Osta, p. 205).

 

4.Philippe de Champagne.

 

Le nom de Philippe de Champagne ou, plus précisément « de Champaigne », fait référence à un peintre français d’origine bruxelloise (né à Bruxelles, le 26 mai 1602, il est mort à Paris, le 12 août 1674) du 17ème siècle qui, ayant refusé de rejoindre l’école de Rubens, arriva à Paris, en 1621, afin de s’y perfectionner. Elève de Jacques Fouquières, il travailla avec Nicolas Poussin à la décoration du Palais du Luxembourg. Philippe de Champagne était un peintre classique, essentiellement religieux. Bien que fixés à Paris, Philippe de Champaigne et son neveu, également peintre, gardèrent des relations suivies avec leur ville natale, notamment avec Antoine Arnould, janséniste exilé par Louis XIV, qui résida à Bruxelles, dans la clandestinité, de 1682 à 1694, année de son décès. Le tronçon de la rue qui porte le nom de Philippe de Champagne, compris entre la rue du Midi et l’ancienne « rue Vésale » (à ne pas confondre avec l’actuelle « rue Vésale » située dans un tout autre quartier), soit l’actuelle « rue Rouppe », fut nommé, en 1844, « rue Traversière ». En 1851, on décida de donner à cette artère le nom de « Philippe de Champagne » ; elle s’étend aujourd'hui de la rue du Midi à la rue du Poinçon.

 

5.Le Jardin des Olives.

 

A proximité de la rue de Midi se trouve la rue du Jardin des Olives. Cette artère doit son nom à des terrains lotis en 1358 par la Ville de Bruxelles et situés en face de l’église Notre-Dame de Bon Secours. A la même époque, un homme acquit plusieurs parcelles de ces terrains afin d’y reconstituer le biblique « Jardin des Oliviers ». « Ce calvaire, clos par une grille, où le christ était représenté priant dans le Jardin des Olives et entouré de ses apôtres endormis, était planté d’arbustes rares et de lilas ; il a été démoli vers 1815 pour faire place à des habitations. » (Dictionnaire historique des rues, places…de Bruxelles, p. 249). Le mur de la première enceinte qui était implanté dans cette rue, contournait l’église Notre-Dame de Bon Secours située à l’intérieur du rempart, et traversait perpendiculairement l’actuel boulevard Anspach dans l’axe de l’alignement des façades. Ainsi, le rempart longeait-il la Senne qui se dédoublait à cet endroit à deux reprises pour former la Petite Île et la Grande Île.

 

Eric TIMMERMANS.

 

Sources : Bruxelles, notre capitale, Louis Quiévreux, PIM-Services, 1951, p. 16 / Dictionnaire historique des rues, places…de Bruxelles » (1857), Eug. Bochart, Editions Culture et Civilisation, 1981 / Le français à Bruxelles aux siècles passés, L. van den Bruwaene, Rossel, 1980, p. 133 / Promenades bruxelloises, la première enceinte », Ville de Bruxelles, Cellule patrimoine historique / Dictionnaire historique et anecdotique des rues de Bruxelles, Jean d’Osta, Le Livre, 1995 / Ilot Sacré, Georges Renoy, Rossel, 1981.


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